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J'ai déjà traité le sujet de la solitude.
Mais d'autres idées me viennent à l'esprit. Pourquoi les autistes ont-ils à faire face plus que d'autres personnes à ce sentiment de solitude ?
On vient de m'expliquer que si les gens aiment tant se retrouver, faire des activités de groupe, et fondent une famille, c'est souvent beaucoup pour fuir la solitude, par peur de rester seuls. Ce n'était pas une évidence pour moi, loin de là.
Je suis habituée à la solitude, depuis des années, elle m'accompagne, telle ma meilleure ennemie. Je l'apprécie beaucoup à certains moments, car elle me permet une grande liberté. Je n'ai pas à me confronter à l'avis des autres pour avoir à prendre mes décisions.
Les autistes ont peut-être du mal, comme moi, avec la notion de groupe, car ils peinent à s'adapter aux exigeances des autres personnes. Non seulement leur faible théorie de l'esprit ne leur permet pas d'anticiper les désirs des gens, mais également leur propre fonctionnement fait qu'ils ont des habitudes, des rituels ou routines nécessaires à une bonne cohérence centrale. C'est neuro-physiologique, typique de l'autisme.
Mais je pense qu'il est fondamental de cultiver l'aspect social et d'éviter de sombrer peu à peu dans le gouffre toujours plus béant de la solitude. Car plus on s'y enfonce, et plus il est difficile d'en sortir.
Certains l'apprécient réellement et sont solitaires par nature. Je dois avouer que j'aime beaucoup mes moments de solitude. Mais je réalise qu'avec les années et mes divers échecs sociaux, ces périodes où je reste seule deviennent plus longues et plus fréquentes.
Dans notre société individualiste, et avec les difficultés à obtenir et garder un emploi, de plus en plus de monde rencontre la solitude un jour.
Ceux qui ont la chance d'avoir un travail qui leur convient gardent des relations, même superficielles avec les gens. Mais lorsqu'on s'écarte de la société, il est important de retrouver à quoi se raccrocher. Nous sommes des êtres humains, des êtres sociaux par nature. Et dans la solitude nous sommes juste avec nous-mêmes, avec notre esprit et nos pensées, et nous répétons au quotidien les mêmes schémas de fonctionnement. Lorsque l'on est seul, il est difficile d'avoir du recul sur soi-même et d'évoluer.
Dans le film Into the Wild, le héros, en quête de liberté, se retrouve de plus en plus seul. Ne réalise t'il pas à la fin que "le bonheur n'est réel que lorsqu'il est partagé" ? Mais il s'en rend compte trop tard, il a coupé tous les liens avec ses proches, et il n'a pas de moyen de revenir en arrière.
J'encourage vivement les aspies à éviter de couper les liens qui les rattachent aux autres. Suite à des déceptions, nous avons une tendance à réagir à l'extrême et à stopper tout contact avec la personne concernée. Certes, il est important de nous protéger si nous considérons que cet individu nous est réellement nocif. Mais nous pouvons aussi prendre du recul et essayer de juger des qualités positives de la personne. N'est-il pas dommage de s'en priver ? N'allons-nous pas perdre gros en rejetant tout en bloc ?
Nous avons du mal au niveau relationnel. Notre communication souffre de nombreux problèmes, souvent par manque de compréhension mutuelle.
Mais la solitude non méditative nous enfonce dans un puits profond. Je dis non méditative car certaines pratiques spirituelles nous permettent de tirer profit de la solitude pour évoluer favorablement.
Dans la solitude nous sommes seuls avec nous-mêmes. Mais très vite nous avons fait le tour de notre micro-univers et alors nous tournons en rond.
Enrichissons-nous les uns des autres. J'encourage mes amis autistes à cultiver leurs capacités relationnelles et à améliorer leurs facultés de communication. Les moments de solitude peuvent être conservés, mais en alternance avec des périodes d'immersion sociale.
C'est un effort important, mais qui en vaut la peine.
Gardons la solitude comme une alliée précieuse, mais sans la laisser nous enfermer.
